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Vous avez dit "Libéral" ? Typologie des différents pays (Europe et monde)

dimanche 20 novembre 2005, par Laurent Simon


Le référendum sur le Traité Constitutionnel a donné l’occasion à une déferlante oratoire "anti-libérale" de se manifester en France. Le mot "libéral" a été utilisé à toutes les sauces, très souvent à tort et à travers, le plus souvent comme synonyme de "ultra-libéral".

Pourtant le libéralisme n’est pas synonyme de "aucun Etat". Il est seulement opposé à l’inflation de l’Etat, aboutissant à un Etat obèse. Ce qui est manifeste en France et cause bien des problèmes dans notre pays.

L’Etat français, à trop vouloir s’occuper de tout, est devenu obèse ET impuissant dans bien des domaines, y compris ceux pour lesquels il est le plus légitime : ce qu’il est convenu d’appeler les "missions régaliennes" de l’Etat, parmi lesquelles : Défense, Justice, Sécurité.

L’ampleur considérable des nombreux déficits commence à être connue en France, mais peu d’actions sont menées pour vraiment les résorber. Et l’opinion française, bercée par une presse de gauche étatiste et des médias "gaullistes" qui le sont presque autant, n’a pas encore pris la mesure des incroyables déséquilibres dont nous payons aujourd’hui le intérêts, et dont il faudra bien que nous et nos enfants paient le principal plus tard !

En attendant, cet article a pour but de présenter les approches différentes de plusieurs pays sur la planète. Pour montrer que la France a des approches assez différentes de bien des pays développés, y compris européens.

Nous avons voulu positionner des pays puissants et / ou emblématiques, comme les Etats-Unis, la Chine, l’Inde, la Russie, l’Allemagne, la Grande Bretagne, l’Espagne, la Turquie, Israel, ainsi que certains régimes d’un passé encore proche : la serbie nationaliste, l’URSS, l’Allemagne nazie.

A cette fin, nous avons cherché à définir des critères les plus significatifs possibles, afin de pouvoir faire une représentation graphique de ces différents régimes.

Il nous est apparu essentiel de distinguer 4 à 6 dimensions fondamentales :
- Etat et économie
- Nation
- Pouvoir
- Religion
- Pouvoir central
- Science

Pour chaque critère, deux ou trois extrêmes existent et le tableau suivant permet de distinguer les positions "raisonnables", pratiquées dans les systèmes qui semblent les plus respectueux des droits de l’homme, et en même temps les plus efficaces au niveau économique :

Economie étatisme libéralisme ultra-libéralisme
Nation nationalisme droit international internationalisme
Pouvoir dictature démocratie droit du plus fort
Religion théocratie laïcité athéisme d’état
Centralisation jacobinisme (centralisation abusive) subsidiarité - fédéralisme anarchisme
Science scientisme (science = une nouvelle religion) relation saine à la science refus de la science

L’étape suivante consiste à présenter chaque régime comme un "cocktail", une combinaison de 4 ou 5 critères sur la nature du pouvoir, de la démocratie, du système économique, de l’influence d’une religion, etc.

Pour des raisons pratiques, la représentation graphique est plus facile avec 4 critères qu’avec 5 ou 6. Ce qui nous oblige à schématiser un peu plus la réalité, avec toutes les approximations que cela peut impliquer, et qui pourront surprendre le lecteur, par leur éventuel côté caricatural.

Notre but est moins d’avoir une représentation "scientifique" de ces différents régimes, mais plutôt d’en dresser en quelque sorte une cartographie, utile pour dialoguer et articuler les réflexions dans ces domaines. Il s’agit de montrer les différences entre les systèmes, avec le risque de devoir forcir le trait.

Nous avons donc constitué deux représentations graphiques, prenant en compte 4 des 5 critères mentionnés ci-dessus. Les deux derniers critères (Religion et Centralisation) ne sont pris en compte que dans une seule de ces deux représentations.

Le recours à ces deux représentations est utile pour marquer les différences entre certains systèmes. Par exemple entre Allemagne (fédérale) et France (très jacobine), entre l’Iran (théocratie) et la Chine (supposée ici respectueuse du droit des différentes religions). Ou entre les Etats Unis de Clinton et ceux de Bush (évolution vers un système théocratique).

Les résultats sont présentés avec les tableaux et graphiques suivants [1] :

Economie étatisme libéralisme
Nation nationalisme droit international
Pouvoir dictature démocratie
Centralisation jacobinisme fédéralisme

cerclePays21 Copyright Laurent Simon, Paris, 2005

Quelques commentaires sur ces graphiques  :

- cet essai est réducteur, certains termes peu adaptés : par exemple les pays scandinaves sont évalués comme ’fédéraux’, faute de trouver un meilleur terme pour l’opposé de ’jacobins’ ; le poids de l’Etat y est généralement fort, mais sans ce côté jacobin très important en France.

- la représentations en deux dimensions d’éléments qui en ont 4 est difficile... Sur chaque cercle il faut donc faire attention de bien distinguer les secteurs externes (Japon par exemple, pour démocratie, droit international, libéralisme, jacobinisme) et internes du même quartier (pays scandinaves pour démocratie, droit international également, mais fédéralisme et étatisme). Le Japon est supposé jacobin, par l’importance d’organismes comme le MITI, qui permettent d’organiser les réponses des entreprises japonaises, en cohérence avec des plans pluriannuels conséquents.

- l’Allemagne et l’Italie ont toutes deux été placées de façon intermédiaire, entre étatisme et libéralisme, ce qui les place entre les pays scandinaves et une grande partie des pays européens (Irlande, Espagne, Grande Bretagne, Suisse, etc.). Les systèmes allemands et italiens sont marqués par une grande importance de l’Etat, même si l’Allemagne a un secteur public beaucoup moins important que la France (il faut dire que parmi les pays développés la France détient le record de l’étatisme).

- la France est seule dans son secteur externe : démocratie, droit international, étatisme, jacobinisme.

- les Etats Unis ont été considérés comme nationalistes, à partir du nombre de guerres qu’ils ont déclenchées dans les 60 dernières annés (et aussi par les mesures de protectionnisme prises régulièrement). La France a été ici considérée comme soucieuse de droit international, mais c’est en partie parce qu’elle n’a plus les moyens de mener des guerres coûteuses : certaines approches françaises sont assez proches de celles des Etats Unis, et la France aurait probablement une attitude différente si elle était plus puissante. Faut-il s’en réjouir ?

- la Chine et la Russie ont été rangées dans les régimes dictatoriaux, nationalistes, jacobins et ayant un système économique "libéral". Evidemment plusieurs de ces évaluations sont assez grossières : la Russie actuelle est moins dictatoriale que l’URSS, leur "libéralisme" est très souvent plus proche de l’ultra-libéralisme.

Pour compléter et affiner cette repésentation graphique, voici un visuel représentant les aspects "étatisme vs libéralisme" et "jacobinisme vs fédéralisme (décentralisation)"

GIF - 2.7 ko
carrePays21

On le voit, la France occupe une position particulière parmi les pays développés, de par la conjugaison des critères étatisme et jacobinisme.

C’est tellement vrai que beaucoup de Français ne s’en rendent même pas compte. C’est une des raisons qui rendent les vrais changements en France particulièrement difficiles : les journalistes, sous-payés et votant à gauche à 80%, ont tendance à présenter, consciemment ou non, les informations sous un jour peu favorables aux adaptations pourtant bien nécessaires.

L’exception française se constate par de nombreux indicateurs bien mauvais, bien différents de beaucoup de pays européens :
- le taux de chômage général est particulièrement important, ainsi que pour les plus jeunes et les seniors.
- les déficits sociaux sont très préoccupants, et en particulier les déficits chroniques de la Sécurité Sociale.
- charges sociales particulièrement lourdes, pénalisant l’emploi peu qualifié ET très qualifié, alors qu’un bon niveau de formation (des élites) est pourtant une grande force potentielle de la France
- ces charges sociales particulièrement élevées empêchent également les salaires d’être augmentés, ce qui crée une frustration importante parmi les salariés, qui ont l’impression d’être la dernière roue du carosse.
- le nombre de Français actionnaires est relativement faible, et 40 à 50% du capital des entreprises "françaises" (du CAC40) sont détenues par des fonds de pension anglo-saxons. Une bonne partie des bénéfices réalisés en France s’en vont donc à l’étranger...
- la quasi inexistence en France de ces fonds de pension pénalise également le développement des entreprises.
- le tissu économique de PME est bien moins dense que dans la plupart des pays européens, par exemple en Allemagne.
- peu d’entreprises innovantes (nouvelles technologies) se créent ou se développent, par suite d’un capital risque 10 fois moins important qu’en Grande Bretagne et 100 fois moins important qu’aux Etats Unis
- l’échec scolaire est très préoccupant pour une bonne partie des élèves.
- plus généralement l’exclusion économique et sociale d’une part importante de la population est constatée ; exclusion qui s’est traduite récemment par les émeutes dans les banlieues.
- etc.

L’ennui c’est que ces dysfonctionnement sont perçus par les français comme le signe d’une insuffisance d’action de l’Etat... alors qu’ils sont pour la plupart la conséquence directe d’un Etat français obèse, d’un Etat providence attendu par les français, mais pourtant désormais introuvable !

Deux des meilleurs signes en sont le déficit public depuis 30 ans, et la dette publique qui en résulte, abyssale : 1 100 milliards d’euros.

C’est bien l’étatisme et le réflexe "Etat-providence", combiné à un keynasianisme mal compris et à un manque patent de courage des hommes politiques depuis 30 ans qui est une cause essentielle de ce trou sans fond qu’est la dépense publique. Tout en étant aussi la source de déficits considérables dans certaines entreprises publiques, comme la SNCF, et dans des institutions étatiques comme la Sécurité Sociale.

Signalons au passage que ces déficits chroniques empêchent également l’Etat de pratiquer une relance énergique pendant les périodes contra-cycliques (de "vaches maigres").

Comme quoi ces déficits chronique ne sont vraiment pas le signe d’une gestion Keynésienne, contrairement à ce que pensent la plupart des gens de gauche qui se croient "informés"...

Notes

[1] Pour compléter cette "projection" sur 4 dimensions, voici ci-dessous les éléments prenant en compte les rapports avec la religion.

Economie étatisme libéralisme
Nation nationalisme droit international
Pouvoir dictature démocratie
Religion théocratie laïcité

cerclePays22 Copyright Laurent Simon, Paris, 2005

- l’athéisme en URSS a joué le rôle de ’religion d’état’, empêchant l’exercice libre des différents cultes présents en Russie avant 1917. C’est pourquoi nous avons rangé l’URSS sous le critère théocratie (et athéisme)... Même si ce n’est pas à ce niveau que la répression a été la plus féroce.


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