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L’élection de Sarkozy ressemble décidément au vote NON de 2005 ( !), et à l’élection de Mitterrand en 1981 !

mardi 29 avril 2008, par Laurent Simon


Voir en ligne : "C dans l’air", 25 avril 2008. Sarko, Acte 2, scène 1. Avec la vidéo de l’émission.

Le vote Sarkozy à l’élection présidentielle de 2007 a été franc (53%), et encore plus massif (84% de participation, avec 95,8% de votes non blancs ou nuls, soit 80,5% de votes exprimés) que le vote NON de 2005.

En quelque sorte ce vote Sarkozy est à la fois :
- une rupture par rapport aux votes précédents (y compris bien sûr 2002), qui se traduisaient par une lente érosion de la participation et de la cote des hommes politiques
- et une sorte de redite du référendum 2005, avec une inversion des résultats, par un OUI encore plus massif : un brusque retour de l’espoir dans la politique, et dans l’importance du rôle du Président de la République.

C’est aussi une réponse, favorable, aux promesses d’un candidat qui s’est présenté comme homme providentiel... avec tous les risques cela représente : l’expérience montre invariablement que celui qui veut être un "sauveur" dans une situation où beaucoup de gens se sentent victimes d’une situation défavorable, ce qui est bien le cas en 2005-2007, se transforme en ’victime’ et / ou ’bourreau’.

Les exemples dans l’histoire abonde. Prenons un exemple récent, et particulièrement évident : Bush a voulu sauver l’Irak d’un (authentique) dictateur, et s’imaginait donc que les soldats américains allaient être aussitôt et durablement acclamés... alors que ces soldats se sont retrouvés très vite victimes (de nombreux attentats) ou bourreaux (voir par exemple la prison d’Abou Grahib)... Et sur la scène internationale Bush a été vu comme bourreau, ou comme victime, selon le point de vue de l’observateur !

Et ce qui devait arriver... arriva avec Nicolas Sarkozy : très vite sa cote de popularité s’est inversée, après une très forte adhésion, qui aura quand même duré environ 6 mois.

Et cette élection de Sarkozy est donc bien une sorte de répétition de 1981... sauf que la chute a été encore plus rapide qu’après la première élection de François Mitterrand (rappel des chiffres de l’élection : 51,8% des voix, 85,9t% de participation, soit 83,4% de votes exprimés ; soit encore 43,2% des inscrits, ce qui est très très proche du résultat de N. Sarkozy : 42,7% des inscrits...).

Dans les deux cas il y a eu une très forte attente par rapport à la politique, qui était supposée pouvoir régler beaucoup de problèmes, y compris économiques. Avec dans les deux cas la même méconnaissance des phénomènes économiques, et la même arrogance, le même volontarisme.

Entendons-nous bien : bien sûr il ne s’agit pas pour nous de dire, ou de laisser croire, que ceux qui ont voté pour Sarkozy avaient tous voté pour le NON en 2005 (une bonne partie, si ce n’est la majorité, de ces électeurs a voté Oui en 2005), ou pour Mitterrand en 1981. Mais ce vote est le résultat d’un mouvement d’ensemble de la société française, et ces votes étaient tous les trois massifs, voire très massifs. Ces votes traduisent donc bien une humeur générale, que nous essayons d’éclairer, au-delà des paradoxes apparents.

Ce que nous disions en 2005 après le NON ("L’expérience de 1981-1983 n’a pas suffi : la France a voté NON, tentée par un repli faussement salvateur"), par comparaison avec la période 1981-1983, peut malheureusement être redit après l’élection de Nicolas Sarkozy.

Une des seules différences étant que le chômage continue, heureusement, de baisser, mais cela est en grande partie lié au départ assez massif à la retraite (papy boom).

Les autres problèmes sont malheureusement assez proches de ceux constatés en 1981 : creusement des déficits (budgétaire, des comptes sociaux (sécu en tête), déficits publics en général), déficit extérieur qui devient abyssal à son tour, avec toujours des taux de dépenses publiques et de prélèvements obligatoires très élevés.

La crise d’ampleur évoquée, comme susceptible d’arriver vers 2010, reste donc complètement d’actualité, d’autant que les conditions extérieures ne sont pas favorables : crise des subprimes, devenant une crise financière et une crise économique importante aux Etats Unis, hausse du prix du pétrole et des matières premières, chute vertigineuse du dollar).

Une différence, et elle est importante, vient du fait que la hausse du prix du pétrole et des matières premières est très directement liée à la croissance qui reste encore forte en Asie, ce qui modère les effets négatifs de la crise américaine.

Une autre différence, et elle est également très importante, réside dans la volonté supposée forte de Nicolas Sarkozy de faire des réformes qui aient (enfin !) des réels effets sur l’économie.

Espérons simplement que les réformes à venir seront (enfin !) des réformes structurelles, qui s’attaquent enfin aux vrais problèmes de la France. Et non des réformettes, dont l’effet sur les comptes du pays sont très peu visibles, et même réels. Le meilleur exemple étant la non "réforme des régimes spéciaux", dont on ne sait toujours pas si les mesures vont se traduire par une amélioration des comptes liés à la retraite.

Faire des réformes de fond, cela suppose de dire, enfin, la vérité aux Français, et de ne pas craindre d’utiliser des termes comme "rigueur" par exemple...

A condition aussi bien sûr que l’opposition arrête sa démagogie, continuant par exemple de clamer que le nombre d’années de cotisation (retraites) ne doit pas être augmenté. Il était à ce sujet intéressant d’entendre un Manuel Valls s’exprimer ce 29 avril 2008 dans cette direction, même si bien sûr sa vision n’est pas tout à fait la nôtre. Simplement sa voix reste très minoritaire dans la gauche en France.


Reprenons nos intertitres de notre article de 2005, en les adaptant, n’est-ce pas extrêmement actuel... :
- Le vote Sarkozy : une réédition de mai 1981...
- .. par méconnaissance des phénomènes micro et macro-économiques...
- ... en accusant l’Europe, et non les vraies responsables : les "politiques" économiques françaises depuis 30 ans... (la différence c’est que Sarkozy constate que les déficits depuis 1974 sont une des causes majeures de notre situation bien peu enviable)
- Ceux qui subissent le plus la situation votent pour sa continuation (pour l’extrême volontarisme de Sarkozy, très souvent déplacé)
- Les "solutions" de Sarkozy (l’interventionisme, y compris par exemple son intervention incompréhensible à Gandrange en février 2008, par rapport à Arcelor Mittal) sont en fait les causes des problèmes
- L’Europe (et l’euro) nous a beaucoup apporté, mais sert de bouc émissaire (même si le niveau extrêmement élevé de l’euro commence à être extrêmement préoccupant, y compris pour d’autres pays européens, et même en Allemagne)
- Le populisme prospère, à gauche et à droite... (eh oui, malheureusement..., et cela a momentanément payé pour la gauche, aux Municipales et Cantonales)
- .. les enseignements de la sortie de route de 1983 sont oubliés... (eh oui, les faibles marges de manoeuvre qui existaient ont-elles été bien employées avec la plupart des mesures TEPA ("paquet fiscal") ? Ne convenait-il pas de les utiliser pour mettre en place et accompagner des réformes autrement plus ambitieuses ?)
- ... mais cette fois-ci la crise sera larvée, résultant d’une grande incertitude... (en fait, à cause de la crise américaine, les aspects économiques pourraient être assez forts et pas si larvés que cela. Souhaitons que notre Président comprenne qu’il est temps de voir la réalité telle qu’elle est et non telle qu’il voudrait qu’elle soit...)
- ... ce qui compliquera la compréhension des phénomènes en jeu, et retardera la perte des illusions (peut-être que cette fois-ci les Français pourront enfin ouvrir les yeux, et le Président avec eux ?)
- Quelle crise faudra-t-il donc attendre pour que les Français comprennent ? (peut-être que cette période de début 2008 sera finalement assez favorable à cette prise de conscience ? au moins pour une partie des Français ?)
- En attendant : une grande instabilité économique et politique, qui gênera les réformes nécessaires (l’instabilité crainte n’est pas constatée actuellement, souhaitons que des réformes structurelles seront enfin entreprises, ce qui bien sûr n’est pas facile dans cette situation de chute de popularité ; pourquoi donc a t il fallu que Sarkozy se cramponne à ce point à ses convictions ? A t il enfin commencé à comprendre ? le fait qu’il parle explicitement d’erreurs est-il un signe suffisant ?)
- sauf si, qui sait, des décisions courageuses étaient prises rapidement ? (eh oui, là est la planche de salut, pour Sarkozy, la France et les Français : prendre enfin le taureau par les cornes, et s’attaquer enfin aux déficits de si grande ampleur, et non à seulement 7+5 milliards ! -un millième de ce qu’il faudrait faire, pour reprendre les termes de Elie Cohen, au cours d’une émission de "C dans l’air" du 25 avril 2008 : "Sarko ; acte 2, scène 1")


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