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dimanche 1er mai 2005.

Le débat sur le libéralisme

mercredi 18 mai 2005, par Philippe Ricard


Voir en ligne : Site "Oui à la constitution"

Le caractère libéral de la Constitution enflamme le débat référendaire. Pour ses détracteurs, ce texte constituerait une nouvelle manifestation de la dérive européenne vers le modèle anglo-saxon, susceptible de mettre définitivement en question les acquis sociaux et les services publics à la française.

"On veut obtenir de la gauche une sorte de feu vert pour cette orientation libérale. Notre responsabilité est de lui donner un coup d’arrêt", a dit le socialiste Henri Emmanuelli en lançant sa campagne pour le non début mars.

Aux yeux de ses partisans, le nouveau traité n’apporterait au contraire rien d’inédit dans ce domaine.

Selon Jean-Louis Bourlanges, eurodéputé UDF, "le procès en libéralisme est triplement infondé" :
- il ignore les avancées sociales de la Constitution,
- il oublie qu’elle ne constitue, malgré son surnom, qu’un traité de plus entre des Etats membres susceptibles de le réviser
- et il feint de croire que le texte serait inédit
.

La comparaison entre le traité constitutionnel et les textes aujourd’hui en vigueur donne, dans le domaine économique, plutôt raison à la seconde analyse, sans écarter définitivement les craintes soulevées par la première.

Le texte soumis à référendum reprend la philosophie et les principaux éléments de ses ancêtres : le traité de Rome, en 1957, l’Acte unique créant le marché intérieur en 1985, les traités de Maastricht, en 1992, d’Amsterdam, en 1997, et de Nice, en 2000.

Les travaux de la Convention puis les débats entre les 25 Etats membres ont surtout permis de compiler, là plus qu’ailleurs, l’héritage de cinquante ans de construction européenne, dans un domaine - l’économie - où celle-ci trouve sa principale source d’inspiration, de la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, en 1951, à celle de la monnaie unique, moins de cinq décennies plus tard.

Les grands objectifs économiques de la construction européenne sont réaffirmés. L’Union offre à ses citoyens "un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée", indique la Constitution. "La libre circulation des personnes, des services, des marchandises et des capitaux, ainsi que la liberté d’établissement sont garanties par l’Union et à l’intérieur de celle-ci", est-il ajouté.

Le marché intérieur, la politique agricole commune ou les transports demeurent une compétence partagée entre l’Union et les Etats membres. L’industrie reste un domaine où l’Union doit se contenter d’actions d’appui, en complément des Etats membres, et ne peut pas prendre d’initiatives législatives.

La définition des compétences exclusives de l’Union confirme en revanche la vocation plutôt libérale des politiques strictement communautaires : union douanière, règles de concurrence en vigueur sur le marché intérieur, politique commerciale commune, politique monétaire pour les Etats membres de la zone euro. "Il s’agit peu ou prou d’abroger les frontières, d’ouvrir les marchés, et de faciliter les échanges", dit un expert.

A propos de politique monétaire, il est rappelé, dans la droite ligne du traité de Maastricht, que "l’objectif principal du système européen de banques centrales est de maintenir la stabilité des prix". Cette formulation n’est toujours pas du goût des partisans d’une approche plus keynésienne, qui souhaiteraient que le soutien à la croissance soit placé au même rang que la lutte contre l’inflation, comme aux Etats-Unis.

Parmi les rares innovations susceptibles d’illustrer une nette poussée libérale, la définition des compétences exclusives va au-delà de la situation actuelle en intégrant l’ensemble de la politique commerciale. Les questions d’investissements étrangers, les services audiovisuels, culturels, d’éducation et de santé, aujourd’hui dans le domaine des compétences partagées avec les Etats membres, deviennent du seul ressort de l’Union : le Conseil, qui continue de déterminer le mandat de la Commission dans les négociations et doit entériner les accords commerciaux, devra toutefois statuer à l’unanimité dans ces domaines.

A l’inverse, la Constitution renforce la base juridique permettant de légiférer sur les services d’intérêt général SIEG - les services publics dans le jargon bruxellois : "’La loi européenne établit les principes et fixe les conditions" qui leur permettent de remplir leur mission, "sans préjudice qu’ont les Etats membres de fournir, de faire exécuter et de financer ces services", est-il dit.

Autre différence notable avec les traités précédents : l’orientation libérale de la construction européenne fait parfois l’objet d’une mise en perspective avec d’autres objectifs. "L’Union oeuvre pour le développement durable de l’Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein-emploi et au progrès social", est-il inscrit pour la première fois dans un traité européen.

Parmi les valeurs identifiées par la Constitution, la notion de "solidarité" est introduite, ce qui est de nature à distinguer l’approche européenne de celle des Etats-Unis. Le nouveau traité indique en outre que l’Union doit contribuer dans le monde "à l’élimination de la pauvreté" et à "un commerce libre et équitable".

"Dans le débat sur la nature libérale de l’Union, les dispositions mises en cause sont celles de la mise en place du marché intérieur dans les années 1980", résume le diplomate Etienne de Poncins.

Cet ancien membre du secrétariat de la Convention, auteur de l’ouvrage La Constitution européenne en 25 clefs (Lignes de repère), ajoute : "En fixant le partage des compétences, le texte ne fige pourtant pas à jamais le contenu des politiques communautaires."

Constitution ou pas, celles-ci pourront, en principe, continuer de fluctuer au gré des rapports de force au sein des différentes institutions communautaires : la Commission, le Conseil, où sont rassemblés les Etats membres, et le Parlement européens.

Illustration de cette réalité, les 25 viennent, le 22 mars, d’entériner la réforme du pacte de stabilité et de croissance dans un sens favorable aux intérêts de la France et de l’Allemagne. Le traité de Maastricht, dont la substance est reprise dans le projet de Constitution, n’a pas été modifié à cette occasion.

Mais les multiples controverses sur le pacte et l’évolution du gouvernement allemand, désormais moins attaché à la culture de stabilité qu’au soutien à la croissance, ont permis d’assouplir le seul et unique instrument de discipline budgétaire imaginé pour accompagner la monnaie unique.


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