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Dossier iFRAP du Société Civile n°47

Privilèges RATP

Jusqu’où iront-ils ?

lundi 24 octobre 2005, par Bernard Zimmern, Président de l’IFRAP


Voir en ligne : Site iFRAP

En septembre 2000, l’iFRAP publiait un Dossier intitulé « RATP : vive l’Etat-Providence » dans lequel les enquêteurs révélaient les énormes gaspillages de cette entreprise publique et les privilèges de ses agents. Moins de 30 heures de travail par semaine, des salaires 20 % plus élevés que dans le privé, des retraites à 53,5 ans et deux fois plus élevées que dans le privé, tout cela payé par le contribuable français, même celui qui ne prend jamais le métro, voici quelques-uns des « acquis sociaux » de l’entreprise nationale.

Avec le changement de gouvernement en 2002 et la nomination d’un membre de la nouvelle majorité à la présidence de la RATP (Anne-Marie Idrac), on espérait au moins un arrêt de ces gaspillages si ce n’est une réforme en profondeur de la RATP.

Qu’en est-il 3 ans après ? Amélioration ? Non. AGGRAVATION. Encore plus de privilèges payés par les contribuables. Plus de congés, plus de primes, plus d’agents, plus de subventions pour le comité d’entreprise.

Augmentation des effectifs alors que le trafic voyageurs s’est stabilisé (il a même baissé entre 2002 et 2003) et qu’il n’y a donc aucune amélioration de la productivité qui justifierait des hausses de rémunération.

Plus d’avantages alors que le contexte économique du pays n’a cessé de se détériorer. Hausse des salaires et des primes à la RATP alors que le nombre de chômeurs en France a augmenté de 300 000 entre 2002 et 2004.

Enfin, encore plus de vacances et de repos : 70 millions d’euros pour le comité d’entreprise. Y’a-t-il une justification à ces avantages dans un pays qui compte 6 millions d’allocataires de minima sociaux, avec une augmentation de 150 000 nouveaux inscrits entre 2002 et 2004.

Et le service minimum ? Pas question de l’appliquer. Qui dit mieux ?

Encore plus de privilèges sous le gouvernement Raffarin

- Augmentation des effectifs de 10 % en 3 ans (+ 3 000 agents) alors que le nombre de voyageurs est en baisse
- généralisation des 4 mois de congés (121 jours de repos, presque 3 fois plus que dans le privé)
- mise en place d’un 13 ème mois de salaire en 2004
- augmentation du SMIC (de la RATP) qui est en 2005 de 1 300 euros net par mois (400 euros de plus que dans le privé)
- des salaires pour les cadres dirigeants de plus de 14 000 euros/mois
- revalorisation des primes, dont la « prime de soudure » qui a eu un coup de pouce de 2 000 %
- 3 % de la masse salariale pour le comité d’entreprise (trois fois plus que dans le privé) et 15 millions d’euros de plus qu’en 2000
- plus de 12 millions d’euros seulement pour « améliorer » les centres de vacances (en 2005).
- un fausse réforme du système de santé qui est toujours « gratuit »
- possibilité de prêt pour l’achat d’un véhicule pour un certain nombre d’agents
- le passage de CDD en CDI pour le personnel de gardiennage des centres de vacances
- augmentation du parc locatif géré par la RATP et des loyers « aidés »...
- sans oublier que le gouvernement n’a pas osé toucher au régime des retraites dont le montant ne figure pas dans le bilan et qui s’élève à 18,2 Mds d’euros
- et n’a pas osé instaurer le « service minimum »

Tout cela pourrait se justifier si la productivité du personnel de la RATP avait augmenté : hausse des salaires, des avantages, très bien si le trafic s’était accru à personnel égal, ou s’étaient réduits (salaires et avantages) à trafic constant. Mais le personnel a augmenté tandis que le trafic se stabilisait et amorçait même une baisse.

Effectifs39.65542.82743.290+9,17%
Trafic M de voyages2.4872.6662.613+5,06%
Trafic/Effectifs62.71562.25060.360-3,76%
Salaires et traitements M€1174,11272,41304,2+11,08%
Recettes commerciales directes1.373,31.533,21.561,513,71%
Prix/voyageur 0,79 0,95 1,01 25,56%

La RATP continue de faire supporter son déficit par les entreprises de la Région parisienne et le budget national puisque le ratio des recettes commerciales directes sur les dépenses totales est resté stable : 1561/3674=42,5 en 2000 et 1373/3265=42% en 2004 soit moins de la moitié des charges - Il faudrait une ligne pour les dépenses totales.

- 1561 est pour 2003 et 1373 pour 2000 Et le maintien de ce ratio n’a été possible qu’en faisant supporter à l’utilisateur un accroissement énorme du prix de la prestation de l’ordre de 25%. L’absence de gains de productivité et l’augmentation des effectifs conduisent à une hausse du billet (plus de 4 % en moyenne par an entre 2002 et 2004) qui fait fuir les utilisateurs vers la voiture. Le personnel du métro mène la belle vie sur le dos des prolétaires qui n’ont pas de voitures et ne peuvent échapper au monopole RATP. Les "nouveaux riches" de la RATP n’ont aucun sens de la solidarité quand ce n’est pas pour accroître leurs avantages.

Même la RATP le reconnaît : « De moins en moins de voyageurs »

Plus de privilèges alors que le nombre de voyageurs s’est stabilisé et a même baissé ? A la RATP c’est possible. Longtemps sujet tabou, la chute du nombre de voyageurs transportés est reconnue même par la RATP. La direction du "Comité Régie d’Entreprise) (CRE-RATP) reconnaît que « les transports en commun ne représentent que 28 % des déplacements mécanisés contre 70 % pour la voiture particulière, dont la part progresse de façon constante. 70 % des déplacements se font de banlieue à banlieue, dont plus de 80 % d’entre eux en voiture »2..

D’ailleurs, dans toute la France, l’automobile assure près de 9 déplacements motorisés sur 10, les transports en commun (métro, tramway et autobus) n’assurant plus que 10 % des déplacements. Après son arrivée au pouvoir, le gouvernement Raffarin n’a pas su arrêter l’inflation de personnel et a continué cependant à laisser s’accroître les privilèges concédés au personnel alors qu’ils étaient déjà exorbitants et a laissé supporter au reste du pays plus de la moitié des dépenses.

1,5 Mds d’euros de recettes de trafic mais 2, 2 Mds de charges de personnel

D’après les chiffres officiels fournis par la RATP, les recettes totales représenteraient 3,6 Mds d’euros/an3. Une lecture attentive du budget montre qu’en réalité les recettes directes (en provenance du trafic) ne s’élèvent qu’à 1,5 Mds d’euros/an, environ 42% du total des recettes. Le reste provient directement de la poche des contribuables et de celle des entreprises. A cela s’ajoute le coût des retraites des agents, environ 438 millions d’euros par an. D’ailleurs les charges de personnel s’élèvent à 2.2 Mds d’euros/an, c’est-à-dire 85% du total des recettes et 700 millions d’euros de plus que les recettes provenant de la vente des billets.

L’argent des contribuables n’est pas versé directement par l’Etat à la RATP. Il passe d’abord par le STIF (Syndicat des Transports en Ile de France) qui, comme le RFF (Réseau Ferré Français) pour la SNCF, sert de caisse d’accumulation des dettes (elle s’élève à 200 millions d’euros/an, environ 400 euros par agent et à un total de 4 Mds d’euros) de l’entreprise afin de montrer que les comptes ne sont pas dans le rouge.

La RATP, ainsi que les autres entreprises publiques, a la mauvaise habitude de présenter officiellement des comptes tronqués, dans lesquels il manque les dettes, les coûts des retraites et, souvent, une partie des privilèges des agents.

La RATP coûte 2 Mds d’euros / an aux contribuables français (même à ceux qui ne prennent jamais le métro)

Les vrais comptes de la RATP (2003)

Charges 4,3 Mds €
Dont charges de personnel 2,2 Mds €
Recettes de trafic1,5 Mds €
Recettes provenant des subventions publiques et des entreprises2,0 Mds €
Dette de l’entreprise4,0 Mds €
Retraites (hors-bilan et non provisionnées) (12 fois les recettes de trafic) 18 Mds €

« 4 mois de repos » par an pour tous les agents

Lors des négociations sur le temps de travail, les syndicats de la RATP ont bien insisté sur la « pénibilité » de leur travail et sur les horaires décalés. Il est vrai que certains d’entre eux peuvent commencer très tôt le matin ou finir à 1h30 du matin, comme sur certaines lignes. Toutefois, il faut préciser que la nuit il n’y a pas de métro, que seulement quelques bus circulent le dimanche et le nombre de rames de métro est divisé par deux les week-ends.

Sans oublier que la RATP est en sureffectif : le métro de Paris emploie le même nombre d’agents que le métro de Tokyo pour 2 fois moins de voyageurs transportés. Et, de plus, il existe d’autres métiers avec les mêmes contraintes (gardiennage, sécurité, ramassage des ordures, etc.) mais qui ne proposent pas les mêmes compensations.

Alors, pourquoi 121 jours de repos ? Cela a été le résultat des négociations entre les syndicats et la direction (qui ont lieu tous les ans) et qui ont débouché en 2003 sur l’adoption des 121 jours de repos obligatoires pour tous les agents quelle que soit leur fonction dans l’entreprise : secrétaires, femmes de ménage, comptables, informaticiens ou conducteurs de rames bénéficient tous du même avantage.

Les agents qui travaillent la nuit (les poseurs et ceux de la caténaire) bénéficient même de 129 jours de repos/an, un gain qui s’accompagne cependant d’une augmentation du temps de travail de 5 minutes par jour (sic).

Exemple :

Pour quelques catégories de personnel, comme par exemple les machinistes qui travaillent aussi certains week-ends, le calcul des jours de repos se fait différemment car on prend en compte aussi certains samedis et dimanches.

Nous avons fait une enquête sur le travail d’un chauffeur de bus parisien. Celui-ci travaille en moyenne 5-6 heures par jour et souvent les week-ends. Il a droit aux « 121 repos » ; toutefois dans ces jours sont inclus aussi les samedis et les dimanches non-travaillés. Dans notre cas, 55 jours.

Il reste donc 66 jours de repos (13,2 semaines de vacances), ce qui représente plus de deux fois la moyenne du privé. Et notre chauffeur ne travaille qu’environ 5-6 heures/jour contre 8 heures dans le privé.

Les « bourses d’échange »

Certains agents ne souhaitent pas profiter des « 121 repos » et ont demandé à transformer les jours de repos en jours de travail (avec une rémunération supérieure car ce sont des jours de vacances). Pour cela, certains syndicats ont accepté des protocoles locaux dit « bourses d’échange » qui permettent de travailler sur les jours de repos pour pouvoir se les faire payer.

La CGT s’y est opposée mais Force Ouvrière a accepté de signer ce genre de protocole au dépôt des Pavillons où les agents peuvent travailler jusqu’à 16 jours de repos.


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