Libéral ET Social ! L’incontournable économie sociale de marché.

Accueil du site > 60. L’Europe en marche > 70. Après le NON français au TCE > Comprendre les raisons du NON, 1 mois après...

Lettre à Stéphane Paoli, France Inter (7-9)

Comprendre les raisons du NON, 1 mois après...

L’information économique de base manque en France, ainsi qu’une véritable éducation à l’économie

mardi 28 juin 2005, par Laurent Simon


Voir en ligne : Emission de France Inter, ce 28 juin, (écoutable ce jour)

Bonjour Stéphane Paoli, et félicitations pour ce 7-9, que j’essaie le plus souvent d’entendre !

Bravo aussi pour cette initiative d’aller chercher les auditeurs, à Limoges pourquoi pas, avec des témoignages divers.

Simplement quelque chose fait énormément défaut, aux électeurs et aux auditeurs : une information sérieuse sur des éléments certes complexes mais déterminants. Par exemple :

- les médias parlent en long en large et en travers des plans sociaux, qui touchent plusieurs centaines ou milliers de personnes d’un coup, mais ne parlent pas de la multitude des PME qui elles créent ou seraient susceptibles de créer des centaines de milliers d’emplois.

- les médias commencent seulement à essayer de voir ce qu’il se passe hors de nos frontières (les pays qui ont fait d’énormes progrès sur l’emploi, en réduisant les dépenses publiques).

- une bonne partie des hommes politiques accuse depuis longtemps l’Europe de tous les maux, et en revanche taisent tous ses apports, depuis des décennies. Comment voulez-vous alors redresser la barre en quelques mois de campagne ?

- personne ne sait en France que "entre 1978 et 2004, la richesse nationale a augmenté de 72% alors que le volume des dépenses de fonctionnement de l’Etat a augmenté de 192% ..." (Richard Michel, La Chaîne Parlementaire LCP AN, hier, PROCHAINES DIFFUSIONS Mardi 28 juin à 02:01 Mercredi 29 juin à 13:00 Samedi 02 juin à 20:00), c’est à dire près de 3 fois plus !!!

Bref, le peuple (et en particulier le "peuple de gauche") n’a pas les élements d’information qui lui permettraient de comprendre la situation de la France.

Il accuse donc les hommes politiques et les médias de l’écart grandissant entre les efforts faits (de plus en plus de travail pour ceux qui ont un emploi, et en même temps de plus en plus de chômage) et la gratification potentielle (salaire).

L’écart c’est les impôts, mais aussi et surtout les charges sociales, dont nous tenons les records du monde développé, et qui sont un redoutable frein à l’emploi (voir par exemple : "Des charges sociales excessives : la France championne d’Europe, et du chômage !").

Est-ce un hasard si nous détenons aussi les records en matière de chômage (général, des jeunes, des seniors) ?

Vous posiez il y a quelques mois la question (en fin d’une émission 7-9) : "comment se fait-il que la France fait mieux que ses voisins quand la croissance est forte, et beaucoup moins bien quand la croissance est faible ?" La réponse est simple : il s’agit des (énormes) frais fixes du pays France (voir ce qu’on appelle le "point mort" en économie, pour une entreprise) et de ses très nombreuses rigidités. Ces frais fixes sont en grande partie les dépenses de fonctionnement de l’Etat.

En dessous d’un seuil de croissance, tout est très difficile : l’entreprise ou le pays "perd" de l’argent, des emplois, de la confiance, etc., ce qui crée un cercle vicieux et les nécessaires évolutions sont rendues encore plus difficiles.

Et au-dessus de ce seuil de croissance, les évolutions positives sont accélérées : bénéfices donc recettes fiscales, embauche donc emploi, et moins de "dépenses sociales" (liées au chômage ou non), taux de charges sociales pouvant décroître, etc. [C’est pour cela qu’il faut en ce moment "de vaches grasses" oser prendre des mesures délicates]

Autrement dit : réduisons les dépenses publiques (et de fonctionnement en priorité, non d’investissement comme cela est systématiquement fait depuis longtemps), et nous aurons un "point mort" beaucoup plus bas, donc une économie beaucoup plus agile, plus flexible, capable de s’adapter pour répondre aux fluctuations rapides des marchés (mondialisation oblige, nous ne sommes plus dans la stabilité dans la croissance qui caractérisait les 30 glorieuses), et donc capable de créer massivement des emplois !

Le problème c’est que personne ne dit aux Français que chaque année qui passe augmente l’ampleur des problèmes à résoudre : même un déficit public de "seulement" 3% est énorme (de l’ordre de 50 milliards d’euros). Et il a fallu attendre 30 ans pour que l’on entende le ministre de l’économie évoquer la gravité de la situation et dire que désormais les revenus de l’Impôt sur le Revenu vont à peine suffire à payer les intérêts de la dette !!! Et tout ceci pour des dépenses de fonctionnement... S’il s’agissait d’investissement ce serait déjà très différent.

Evidemment le malaise est très grand en France. Voir d’ailleurs l’article : "Un NON annonciateur d’une crise majeure, genre mai 68, avant 2010 ?"

Et je ne suis donc pas très optimiste.

Car quand Jean Marc Sylvestre (économiste) s’exprime dans sa chronique matinale à France Inter vers 7h15, ceux qui devraient l’écouter s’empressent de détourner les oreilles...

Il y a un vrai problème d’information, et d’éducation des français à comment fonctionne l’économie. Au lycée les élèves apprennent des notions d’économie très simplificatrices : le Keynesianisme n’est pas ce qu’on leur apprend, et on leur fait croire qu’il vaut mieux du déficit public (de fonctionnement - et sur une très longue période -) que du chômage...

Keynes n’a jamais dit cela. D’autant qu’à son époque le poids de l’Etat (moins de 20%) était très inférieur à celui de l’Etat en France en 2005, plus de 50%, et que cela change toutes les données du problème. Et l’inverse se produit (en France ou ailleurs) : plus les dépenses publiques de fonctionnement augmentent, et plus le chômage augmente.

Cela se constate d’ailleurs aisément dans les pays qui ont réduit leurs dépenses ainsi que leur chômage ! Dans certains pays européens par exemple, mais aussi au Canada, dont le redressement depuis 1994 est spectaculaire, après une réforme de l’Etat exemplaire.

bien cordialement, et avec mes encouragements pour votre excellent travail, mais insuffisant quand on voit l’ampleur de la désinformation en France

Laurent Simon, un des créateurs du site "Libéral ET social"

- Consultant en Management et Accompagnement du Changement (eh oui, on ne peut pas dire que les hommes politiques (de droite) s’inspirent des enseignements des réussites et des échecs en matière de conduite du changement, ni que ceux (de gauche, mais aussi de beaucoup à droite) se distinguent par du courage.

- Fervent défenseur du OUI (malgré toutes les très nombreuses raisons que j’aurais pu trouver en faveur du Non, par ralbol d’une médiocrité générale, y compris de "nos élites", et par volonté de sanctionner le manque de courage des politiques)


Les partisans du Non vont bien finir par se rendre compte (mais quand ?) de ce qu’ils ont été trompés.

Mais les problèmes sont très vastes, et il faudrait aussi remettre en question certains dogmes, idées reçues et habitudes de pensée bien ancrés en France ! Et nous risquons donc fort de vivre avant 2010 une crise majeure, dont le pire peut sortir.


Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette